Bilan – P. Véder : « La priorité : cet itinéraire sur la spiritualité synodale que nous allons mettre en place »

Dans le sillage du synode sur la synodalité lancé par le Pape François, le diocèse de Port-Louis poursuit sa réflexion sur l’« Église à venir ». Cette interview du P. Veder, vicaire épiscopal et responsable du projet, fait le point sur le chemin parcouru cette année, les expériences concrètes déjà engagées – formation, ensembles pastoraux, participation au Jubilé des équipes synodales à Rome – et les priorités à mettre en œuvre pour faire grandir une Église plus participative, à l’écoute et guidée par l’Esprit.

Quel a été le chemin parcouru pour le projet « Église à venir » cette année ?

D’abord, il faut comprendre que le chantier « Église à venir » s’inscrit dans le processus synodal lancé par le Pape François en 2021. Le Pape François avait lancé un synode sur la synodalité parce qu’il voulait que chaque diocèse réfléchisse sur sa manière de faire Église. Il voulait une Église plus participative, moins cléricale, où tous les baptisés ont leur place et mettent leurs charismes au service des autres. Les expressions « synode » et « synodalité », qu’on entend de plus en plus dans le langage ecclésial, parlent de « faire route ensemble », de « franchir un même seuil ».  D’ailleurs, ce synode est toujours en cours et va durer jusqu’en 2028. Après le décès du Pape François le 20 avril 2025, le Pape Léon XIV a repris le relais.

Mgr Durhône, à la suite du Cardinal Piat, a continué ce processus synodal dans notre diocèse et l’a nommé « Église à venir ». Une petite équipe a été nommée et nous nous rencontrons tous les mois pour voir comment mettre en œuvre les recommandations du synode qui se trouve dans le Document Final approuvé par le Pape François en octobre 2024.

Cette année, nous avons rencontré le clergé pour lui présenter un itinéraire(formation) qui sera adressée en 2026 à tous les baptisés sur la spiritualité synodale. Nous réalisons que beaucoup de Chrétiens ne sont pas au courant de ce grand chantier qu’est le synode sur la synodalité et qu’il cache un grand trésor qu’il nous faudra partager. Cet itinéraire n’est pas une formation de plus, mais il est un chemin que nous proposons, en lien avec l’Église Universelle, pour que l’Église soit ce qu’elle est réellement dans son être, dans sa nature, une Église synodale, où on s’écoute, on marche ensemble, on s’accueille, etc.

Cette année, en octobre, Joyce Rouget, Patrick Michel et moi-même, avions eu cette grande grâce de participer au Jubilé des Équipes Synodales à Rome avec plus de 2000 participants du monde entier. Nous avons pu sentir où les Églises du monde entier en sont sur ce chemin synodal.

Autre expérience cette année en lien avec l’Église à venir c’est la création des ensembles pastoraux, où plusieurs paroisses travaillent ensemble dans l’esprit synodal. Nous avons 3 ensembles pastoraux à titre expérientiel (St Jean-Notre-Dame du Rosaire, Ste Hélène-Ste Thérèse, Sacré-Cœur-Notre-Dame de Mont-Roches – Notre-Dame de Lourdes). Prêtres et laïcs mettent ensemble leurs compétences et leurs charismes pour mieux refléter une Église telle que Jésus l’a voulue.

Quelles priorités nous devons mettre en avant pour continuer à faire grandir cette Église à venir ?

La priorité n’est pas tant de faire des choses, mais permettre de vivre une expérience en Église. L’insistance du Pape François sur la « conversion » pastorale, missionnaire, ecclésiale en dit long. Si chacun de nous ne vit pas personnellement la conversion, l’Église ne pourra pas grandir sur ce chemin synodal. Au fait, ce n’est pas nous qui allons faire grandir l’Église, c’est l’Esprit qui la fait avancer. Nous devons, nous les baptisés, vivre sous l’impulsion de l’Esprit-Saint. Ce qui n’est pas chose facile.

La priorité demeure cet itinéraire sur la spiritualité synodale que nous allons mettre en place en 2026 dans tout le diocèse. Le but de cet itinéraire est de permettre une expérience d’Église où l’on s’accueille, on écoute et on marche ensemble pour construire le Royaume. C’est une formation qui vise la transformation, c’est-à-dire que la formation passe à travers la personne et l’amène à une conversion personnelle. Ce que nous mettons en place produira du fruit que si les participants accueillent l’Esprit et se laissent guider par Lui. Vous imaginez le challenge !

Pour cela, nous devons accepter, prêtres, religieux, religieuses, de marcher ensemble. Nous devons nous interroger, laïcs comme religieux, sur la manière dont nous exerçons notre autorité et notre pouvoir. Pour les prêtres c’est se poser la question du cléricalisme, par exemple et pour les laïcs aussi de s’interroger sur le danger d’un « laïcalisme » - (qui est en quelque sorte un cléricalisme inversé).

Une fois, cet itinéraire de spiritualité synodale vécue (il ne faut pas oublier que c’est un processus et que cela demande du temps), il faudra penser à l’impact d’une spiritualité synodale sur nos institutions de gouvernance, notre manière de prendre de décision collégiale, la manière d’exercer notre pouvoir chez les prêtres comme chez les laïcs, l’entraide entre les paroisses, le fonctionnement de nos différents conseils tant au niveau diocésain qu’au niveau paroissial. Au fait, cette spiritualité synodale quand elle sera bien vécue, nous indiquera le chemin à prendre pour notre Église mauricienne. Nous avons déjà des acquis, il faut le reconnaître, mais il faut voir ce qu’il faut commencer, continuer, changer et éventuellement…cesser.