La COVID-19 et les médias : quelles répercussions sur leur situation économique ? Le rôle de la presse en ce temps de crise ? Une occasion pour les médias de se ré-inventer ? Jean-Luc Emile, Managing Editor de Teleplus, fait le tour de la question.
Dans quelle mesure la pandémie a aggravé la situation économique des médias ?
Les medias mauriciens ont vécu des moments difficiles depuis les premiers jour du confinement. La fermeture des commerces en pleine période de fin de mois a fait que les recettes publicitaires venant par exemple des gros annonceurs habituels avaient disparu. Les journaux ont du revoir leur jour de parution. Un hebdomadaire comme le Dimanche l’Hebdo du Defimedia Group a été publié lundi avec le Defi quotidien parce que boutiques et supermarchés étaient fermés les dimanches. Nous n’avons pas véritablement une culture de kiosque à journaux ici donc les médias ont du improviser.Idem pour les écrans pub à la radio qui se vidaient jour après jour. Ce sont des revenus en moins alors que les opérations continuaient et que les coûts opérationnels n’avaient pas disparu. Un média qui n’est pas robuste et qui n’a pas la colonne vertébrale solide peut facilement se retrouver en difficulté financière. Ce qui aurait pu se passer si la crise avait duré plus longtemps. Nous connaissons déjà la situation de la presse papier et la crise n’a fait qu’affaiblir encore plus certains journaux . Et je pense aussi que les sociétés ne vont pas miser énormément sur la pub sauf celles qui ont besoin d’une plus grande visibilité. La publicité est un budget qui sera coupé dans les prévisions des entreprises en cette période difficile. Les recettes publicitaires ne seront donc plus ce qu’elles étaient. Il y a certes eu un rebond ces derniers jours. Il est visible mais ce new normal est loin d’être ce que nous avons connu dans la vie avant la covid-19.
Quel a été le rôle de la presse en temps de confinement ?
La presse a été une courroie de transmission entre les autorités et les Mauriciens. Je me souviens encore de ces premières conférences de presse du covid committee qui réunissait au delà de 10000 vues simultanés sur le web. Les Mauriciens voulaient comprendre et suivre l’évolution de la pandémie. Ils étaient avides d’information et nous avons répondu à cette demande avec des émissions thématiques, des opérations « solidarité » et surtout la radio au chevet des plus démunis en cette période de crise. Comme par exemple, une vieille vivant seule qui n’avait pas de quoi manger et qui ne pouvait sortir ou une mère qui n’arrivait pas à trouver du lait infantile pour son bébé. A la radio, des auditeurs se sont portés volontaires pour aider. Il y a eu une véritable chaîne de solidarité sur les antennes des radios. Les émissions à la radio avec les débats sur l’impact de la covid, les secteurs affectés et le spectre du chômage ont aidé les Mauriciens à entrevoir ce que serait l’avenir. Il y a eu aussi ces initiatives nouvelles comme les classes à la radio.
Est-ce que cette crise donne l’occasion aux médias de se ré-inventer ?
Personnellement, j’ai réalisé que nous avons réussi à repousser nos liimites. Si jusqu’ici pour les débats nous étions persuadé qu’il fallait avoir 4 personnes sur le même plateau nous avons réussi à utiliser la technologie Skype ou messenger pour réaliser nos émissions avec nos invités en confinement chez eux. Des émissions réalisées entièrement chez les animateurs et des reportages tournés sur téléphone à la maison par des journalistes. Nous avons pu évoluer, et je dirais même, passer à un nouveau palier. Nous nous creusions la tête souvent pour trouver un modèle économique viable pour notre plateforme digitale mais avec le confinement, on a vu que les annonceurs ont fini par faire confiance à la publicité sur le support digital. Il y a eu un grand bond en avant avec des matériels conçus pour la presse en ligne. C’est une nouveauté dans le paysage médiatique.
Pour revenir à la réinvention des médias, forts de l’expérience de la crise, la plupart des rédactions sont parvenues à s’adapter non seulement pour travailler de manière toujours collective, mais aussi pour inventer de nouvelles manières de traiter l’information, dominée par le coronavirus. Une situation qui pousse nécessairement les médias à repenser leur mode de fonctionnement : un selfie vidéo pour un témoignage au lieu de se déplacer pour aller visiter la personne. Il faut souligner aussi l’importance du rôle des journalistes en cette période particulièrement compliquée. Il fallait être prudent et relever les fake news, analyser l’actualité, et pouvoir la traiter de manière claire et pédagogique…
Présente durant le confinement sur les réseaux sociaux, La Vie Catholique, magazine de la famille mauricienne, revient dès ce week-end en paroisse et dans les différents points de vente ! Les employés reviennent sur le journal à l’épreuve du confinement et font le point sur les changements et nouveautés.
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