Le Safer Internet Day a été célébré le 9 février. Internet est un outil à double tranchant. Autant il peut être utilisé comme source d’information, comme moyen de communication, autant il peut être un outil extrêmement dangereux. Aussi, les parents ont la responsabilité d’éduquer leurs enfants afin qu’ils utilisent correctement cet outil. C’est l’avis de Rajen Suntoo, Senior Lecturer à l’université de Maurice.
Pourquoi les gens ont, aujourd’hui, tendance à privilégier la communication virtuelle et en quoi est-ce dangereux ?
Aujourd’hui, notre société se modernise. Internet est devenu un phénomène culturel, peu importe la classe sociale ou la communauté. C’est un outil de proximité qui transcende les barrières physiques, culturelles et sociales. Si internet a ses bons comme ses mauvais côtés, la première chose que nous devons prendre en considération c’est que nous n’avons pas appris à utiliser internet, à connaître les dangers qui s’y cachent. Les enfants surtout n’ont jamais appris à faire la différence entre les sites qu’il faut fréquenter et ceux qui comportent des dangers pour eux. Internet est un monde en lui-même qui recèle beaucoup de choses qui peuvent être utiles ou dangereuses pour les enfants.
Dans la vie réelle, les parents ont le rôle de socialiser les enfants, de leur montrer comment il faut se comporter, s’habiller, l’importance de l’éducation et les bonnes attitudes à avoir. Mais en matière de sécurité sur internet, personne n’a montré à l’enfant comment se socialiser. Ni les parents ni les institutions scolaires et universitaires. Or, aujourd’hui cet outil offert à volonté est mal utilisé. L’enfant lui-même n’est pas forcement en tort. Avec toutes les publicités qu’il y a, lorsqu’il va cliquer sur un lien ou un autre, il se retrouvera sur un autre site et indéniablement sa curiosité va prendre le dessus. Il voudra savoir ce que le site contient et l’explorera, même si peut-être le contenu n’est pas de son âge.
Dans la cour de récré avec ses autres copains, il va discuter de cela et lorsqu’il rentrera, il voudra en savoir plus. L’enfant, à ce moment, va dévier de son normal path of living. Selon moi, cela aura un impact sur ses habitudes et son comportement et ça peut entraîner une dégradation sur sa façon de se voir lui-même, sa famille et la société. À long terme, les effets peuvent être catastrophiques.
À qui revient la responsabilité de socialiser l’enfant ?
La famille a la responsabilité de montrer à l’enfant comment utiliser internet. Généralement, ce sont les parents qui lui donnent cet outil. C’est à eux qu’incombe la responsabilité de montrer à l’enfant les bons gestes. Il y a des moyens de mettre des restrictions sur certains sites afin de protéger les enfants contre des contenus indésirables. Si les parents peuvent acheter une tablette, un smartphone, un laptop ou un ordinateur, ils doivent aussi faire en sorte de protéger ces outils contre les personnes malveillantes qui peuvent nuire à leurs enfants.
Par ailleurs, la société est aussi responsable. Il faut organiser des conférences pour sensibiliser aux dangers liés à l’utilisation d’internet. L’éducation de la société est nécessaire, et pour cela, il faut éduquer les personnes, et commencer dans les écoles. L’éradication des dangers sur internet est quasi-impossible, mais on peut au moins prévoir des moyens pour contrôler l’accès à certains sites aux enfants. Cela permettra de limiter les dangers et de protéger les jeunes. Les chefs religieux ont aussi un rôle à jouer afin d’informer les parents et les enfants sur les dangers liés à internet.
En quoi internet est-il dangereux pour le développement social ?
Beaucoup de jeunes ne sont pas aussi conscients des dangers, des conséquences d’un chat sur Skype ou d’un friend request sur Facebook. Nombreux sont ceux qui ont connu quelqu’un sur Facebook et, quand ils ont rencontré la personne en face, on eu des problèmes : viols, agressions, séquestration, entre autres. Mais si l’enfant n’est pas au courant de ces dangers, il peut facilement être la victime d’un pédophile. Si les parents ne montrent pas les dangers liés à internet, les enfants feront ce qu’ils voudront.
Les jeunes aujourd’hui sont accros à tout ce qui touche aux réseaux sociaux. Ils se sont créé un monde où ils sont ce qu’ils veulent. Ils n’ont plus besoin de sortir, tout est à portée de main, les amis, les connaissances, les évènements. Internet leur permet d’avoir accès à tout dans un seul et même lieu. Cependant, ce problème touche aussi les adultes qui sont eux-mêmes sur les plateformes sociales. Or il est important d’avoir un contact humain, en vrai, et non pas via un écran.
Comment internet a-t-il bousculé le mode de vie ?
Le temps passé sur internet a fait qu’il y eu un changement dans notre mode de vie. Le monde virtuel est devenu la réalité de beaucoup de personnes. Il n’y a plus de barrière entre la réalité et le virtuel. Les jeunes, surtout, ne peuvent pas passer une journée sans internet, mais ne parlent pas avec leurs parents ou leur entourage quotidiennement. Internet, surtout les réseaux sociaux, semble leur offrir une « vie » beaucoup plus attractive que la réalité. De ce fait, internet a le don de remplacer la famille, l’environnement et les amis par des profils, des check-in, des selfies, des tweets et des likes. L’autorité même du parent est bafouée à ce moment-là.
Comment renverser la situation ?
Il est bien difficile de changer la situation, mais on peut contrôler les sites où ils vont et les guider. Je le répète, internet est un merveilleux outil, mais qui doit être utilisé pour progresser. Le rôle de la société est de guider les enfants en leur parlant des dangers et des bienfaits d’internet. Il n’est pas nécessaire d’être online toute la journée, il faut apprendre à contrôler le temps passé sur internet. L’idée est de leur montrer comment gérer ce temps. Cependant, l’exemple doit venir des parents car nombreux sont ceux qui sont accros à internet, tout comme leurs enfants. Il y a un gros effort à faire afin d’endiguer ce problème et de conscientiser les gens sur les risques liés à internet.
Christopher Sainte-Marie
Parents, contrôlez !
Le contrôle parental permet de réguler le contenu des sites selon un critère basé principalement sur l’âge des enfants. Cela permet d’avoir un accès restreint à des contenus jugés inappropriés. Ainsi, les sites à caractère violent ou pornographique seront retirés par le moteur de recherche. Il est aussi important d’installer des outils de protection (antivirus, firewall, etc.) et de procéder à une mise à jour régulière de ces derniers. Il est conseillé de changer régulièrement de mot de passe. Méfiez-vous aussi des demandes inhabituelles : par exemple, votre mot de passe, ou des offres qui semblent être exceptionnelles. La plupart du temps, il s’agit de pièges afin d’obtenir des informations sur vous.
internet – Univers de tous… les dangers
Nul n’est à l’abri des dangers liés à internet. À l’occasion du Safer Internet Day, incursion dans l’univers de la Cyber Crime Unit chargée de traquer, de faire la lumière sur les délits liés à l’usage illicite de l’internet. Et elle a fort à faire…
Internet est aujourd’hui un outil indispensable pour de multiples raisons. Tout un monde est accessible en quelques clics, des millions de gens échangent des données, entament des conversations, chaque seconde. Cependant cet univers virtuel comporte des risques, pour les petits comme pour les grands. La Cyber Crime Unit essaie justement de protéger et d’informer la population sur les dangers liés à l’univers informatique. Elle enquête sur les cas liés à la cybercriminalité et sur tous les crimes qui tombent sous le Cyber Crime Act et l’ICTA Act. Lesquels s’avèrent souvent être des cas d’insulte, de diffamation sur les réseaux sociaux. Faisant partie du CCID (Central Criminal Investigation Department), l’unité a pris ses quartiers aux Casernes centrales en 2006.
Transactions suspectes
Selon Naser Bulladin, enquêteur à la Cyber Crime Unit, les dangers sur internet sont multiples et toute la population peut en être victime. Les compagnies, par exemple, peuvent faire l’objet de phishing, à savoir, le vol de données. « On appelle cela aussi le man in the middle attack », explique notre interlocuteur. Le principe est le suivant : « Cela peut arriver quand une compagnie fait des transactions à l’étranger et qu’elle est surveillée par quelqu’un. Cette personne se ‘place’ – ni vu, ni connu – au milieu du réseau des échanges afin d’avoir accès à toutes les informations qui circulent. Son rôle est de disposer de toutes les informations qui sont échangées et d’être ainsi en mesure d’identifier le bon moment pour frapper. Jusqu’au jour où la tierce personne, pour des raisons banales, demande que la transaction se fasse par le biais d’une autre banque. C’est à ce moment-là que the man in the middle frappe. Ne recevant pas sa commande, c’est bien plus tard que la compagnie comprendra l’arnaque. »
Afin d’éduquer à ce genre de danger, la Cyber Crime Unit organise souvent des campagnes de sensibilisation dans des compagnies. Il arrive aussi que les entreprises contactent d’elles-mêmes l’unité quand elles ont des doutes sur les transactions
suspectes. Même les particuliers peuvent être victimes de phis-hing. Parfois par exemple, les hackers créent des sites identiques à ceux d’une banque et lorsque les clients cliquent sur un lien, ils ont accès à toutes les données qui se trouvent sur l’ordinateur de la personne. Le geste à ne surtout pas faire à ce moment-là est d’introduire son mot de passe, ce qui permettrait au hacker d’avoir accès au contenu du compte bancaire du client. « Preski tou labank inn gagn sa dan Moris », revèle Naser Bulladin.
Afin de pallier à ce problème, des dispositions sont prises par les banques et la population est informée, au moment où ce genre de fraude arrive, par les medias et les banques elles-mêmes. Cependant, le danger de l’internet ne s’arrête pas là. Un des phénomènes les plus souvent observés par l’unité cybercriminelle de la police est la « sextorsion ». Dans la pratique, la sextorsion se fait généralement sur Skype. « Sextorsion ou blackmailing se kan, par exanp, ou zouenn enn zoli tifi lor Skype, zot komans chat, apre li dir ou li anvi al pli loin ek la li komans dezabiye. Li demann ou fer parey, e la ou komans enn bann esanz sexiel par video ek tifi-la. Me seki ou pa kone, se ki li pe rekord tou seki ou pe fer. Seki li fer, li avoy ou enn link kot ena sa video-la. Li dir ou donn mwa tel somm sinon mo pou montre sa ou fami ek mo pou poste sa lor ou kont Facebook ek Youtube. Si arive ou pey-li, demin li pou demann ou plis et li pa pou aret la. Ena dimounn inn bizin pran loan pou pey sa bann dimounn-la. Sa bann dimounn-la
komet sa bann deli-la, zot pa dan Moris e se pou sa ki difisil pou gagn zot », explique l’enquêteur.
Sagesse et responsabilité
La sextorsion est aujourd’hui une pratique bien fréquente, surtout au niveau des jeunes. L’unité de la police tente tant bien que mal de remonter vers les « users », mais cela reste assez difficile. Par contre, la Cyber Crime Unit fait en sorte d’enlever la vidéo sur les plateformes où elles sont mises en ligne. Mais là encore, cela reste aussi assez difficile, car la majorité de ces plateformes vidéo se trouvent à l’étranger et les contacter n’est jamais très simple. L’utilisation massive des smartphones est venue apporter encore plus de travail aux enquêteurs de la Cyber Crime Unit. La fonction première du smartphone est aujourd’hui remplacée par des abus dans le but de dénigrer, diffamer et de maltraiter les autres, tout en restant confortablement chez soi.
Heureusement que la loi est très sévère en ce qui concerne l’utilisation d’un moyen de communication pour nuire à autrui. La loi prévoit dans ce sens des amendes ne dépassant pas plus d’un million de roupies et un emprisonnement de pas plus de 5 ans. « Ziska aster nou bann lamann inn vinn ziska Rs 20 000 a Rs 25 000 roupi par mesaz ki finn avoye », indique Naser Bulladin. Dans une démarche de prévention, la Cyber Crime Unit fait aussi des campagnes de sensibilisation, souvent relayées par les medias, notamment pour rappeler que la vigilance doit être de rigueur sur internet.
Or des astuces existent afin de pouvoir surfer en toute tranquillité. Pour cela, il suffit de simplement de se munir d’un antivirus qui est en vente entre
Rs 500 et Rs 2 000 pour une année. Ces logiciels offrent une protection contre le phishing et d’autres formes d’attaques. La Cyber Crime Unit révèle aussi que de nombreuses personnes utilisent des « crack » pour les softwares. Une pratique qui affaiblit la sécurité face aux attaques.
Il est aussi important de savoir qui on ajoute sur les réseaux sociaux afin de ne pas se faire arnaquer. Il ne faut pas oublier, non plus, que les réseaux sociaux sont publics. Donc, tout le monde peut y avoir accès. Savoir ce que l’on poste, partage, commente, est donc essentiel. Autrement, un simple message sur Facebook peut avoir de graves conséquences sur de longues années.
À noter que tous les délits sous l’ICTA Act et le Cyber Crime Act sont traduits en cour intermédiaire. Et pour les jeunes, avoir un casier judiciaire peut être un lourd handicap quand il s’agira d’entamer une carrière professionnelle. Il est donc fortement recommandé à tout le monde d’utiliser internet
en faisant preuve de sagesse, de responsabilité.
Christopher Sainte-Marie
Quand le « Net » dérape
- À Maurice
Le cas d’Atish Ramnarayan le 8 mars 2014, suite à une annonce qu’il avait passée sur la plateforme d’un journal est le début d’une série de dérapages sur la page Facebook du journal. Ces dérapages considérés comme de la cyber intimidation provoqua un trop grand stress pour le jeune homme qui souffrait de drépanocytose. Il succombe à une crise cardiaque à seulement 29 ans.
- À l’étranger
L’histoire d’Amanda Todd a bouleversé tout le continent américain. À peine âgé de 16 ans, cette jeune fille s’est donné la mort après des long mois de harcèlement après avoir montré sa poitrine à un inconnu sur un site de chat vidéo. Un mois avant sa mort, la jeune fille explique dans une vidéo postée sur YouTube comment son agresseur l’a intimidée et comment cela a transformé toute sa vie.
Daniel Perry, jeune écossais de 17 ans, a mis fin a ses jours après avoir été victime de sextorsion en 2013.
Marion Fraisse, Française, âgée de 13 ans, a écrit deux lettres expliquant ses motivation et ceux qui la martyrisaient à l’école. Elle est décédée en 2013 après n’avoir parlé de ses problèmes à personne.
Jonathan Destin, à l’âge de 16 ans, a passé deux mois dans le coma après s’être immolé par le feu. Apres plusieurs années de harcèlement, il a décidé d’en finir. Après en avoir réchappé, il a publié un livre expliquant son geste.
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