Ces dernières semaines, l’actualité est marquée par le double fait vénal du trafic allégué de cadavres et de la violation de sépultures au cimetière de Bois Marchand. Ces événements nous plongent tous, du plus petit au plus grand, dans un état de choc et d’indignation. Comment notre société mauricienne, si attachée aux valeurs traditionnelles, en est-elle parvenue à un tel stade de morbidité morale ? En quoi ces actes reflètent-ils des mutations sociales et/ou révèlent-ils la perte de certains repères fondamentaux ? Comment comprendre ce nouveau contexte où le lucratif prime sur toute autre considération ? Que faire pour que les morts reposent vraiment en paix et que les vivants appréhendent la mort avec le plus grand respect ?
Je me propose d’aborder ces questions sous trois angles de lecture. (i) une tentative d’explication pour mettre à jour certaines causes sociales d’une telle dégradation. (ii) Une lecture éthique du cadre légal local autour du respect dû au corps humain. (iii) Une lecture critique du « business de la mort » qui s’étend de plus en plus dans le paysage local et les enjeux sociaux et culturels qu’il soulève. Abordons la première lecture.
D’emblée, relevons que ces deux faits sordides, impliquant des catégories opposées de l’échelle sociale, ont pour point commun des intentions lucratives. Qu’il s’agisse des gestionnaires de maison de retraite pour personnes âgées abandonnées ou des pilleurs de tombes à l’affut de métaux qu’elles recèlent, le fait brutal de cette activité infâme consiste à se faire de l’argent sur des cadavres. C’est scandaleux.
Car notre instinct humain nous conduit naturellement à exprimer un profond respect au corps humain sans vie. De plus, la société mauricienne est traditionnellement attachée aux croyances craintives à tout ce qui est lié à la mort. Nous avons intériorisé, à travers les rites funéraires, le caractère sacré du corps humain. Il mérite respect et dignité lors d’une inhumation ou d’une crémation.
Mais, force est de constater que notre société, ces dernières décennies, connaît des profonds changements. Ils bouleversent nos diverses représentations traditionnelles. Ils affectent les rapports fondamentaux que nous entretenons avec la nature et les choses. Par ailleurs, l’idéologie scientiste tend à modeler les esprits et contribue à briser les verrous de certaines croyances au profit d’une vision utilitariste et mercantile du corps humain. Ceci peut expliquer l’usage sans scrupule, et même le trafic de cadavres, à des institutions d’étude de la médecine sans tenir compte du protocole moral qui est dû au respect de tout corps humain.
Pour ce qui concerne le pillage nocturne des tombes jusqu’à dépouiller les cadavres et les laisser en plein air dans un cimetière, il est fort probable que ce soit l’œuvre de certains drogués, issus de milieux précaires, en état de manque. Sans les stigmatiser — au fond ce sont des victimes — nous savons, par témoignage, ce que cela représente pour un sujet toxicomane du besoin compulsif de se procurer chaque jour sa dose. Tenaillé par le manque, il perd tous ses repères jusqu’à ne plus reconnaître les siens. Son seul souci : trouver de l’argent, par tous les moyens, pour se payer sa dose au quotidien. Ce constat pourrait être l’une des causes qui expliquerait ce mode opératoire récent de profanation des tombes.
Du coup, cela nous alerte sur le fléau social de la drogue dans les quartiers pauvres qui ne semble pas, à l’heure actuelle, préoccuper nos décideurs politiques. La lutte contre la prolifération de la drogue, que ce soit en terme de prévention ou de répression, n’est pas à l’agenda social et pourtant les réseaux des marchands de la mort sont très actifs sur le terrain.
Pour terminer, il est bon de se rappeler que depuis la nuit des temps, la tombe où le cadavre est soigneusement entreposé, est la trace indéniable de l’humain. Car seul l’humain procède à l’enterrement de ses morts. Respecter un cadavre, c’est respecter la part d’humanité qui est en soi. Le profaner, c’est souiller toute l’humanité. C’est un acte déshumanisant : « Dimounn finn bebet »Et en faire un trafic sans vergogne, c’est manifestement la marque d’une profonde dégradation sociale et morale.
P. Alain Romaine
Responsable de la pastorale des funérailles
Je suis indignée par le manque de respect de nos morts. Si ainsi on traite nos morts, qu’adviendra-t-il de nos vivants. Souvent il m’arrive de repensé aux valeurs chrétiennes qu’on nous enseigné a l’école plus de 50 ans de cela mes parents en ont appris à respecter les autres et nous les ont inculqués et moi-même j’en ai fait une expérience heureuse a l’école. Nous savons très bien que de nos jour l’argent passe avant la dignité humaine. Je suggère à nos décideurs politiques et à la MBC de programmer des campagnes de sensibilisation sur les fléaux de la société et sur les valeurs traditionnelle. A vous père Alain, je vous suggère d’écrire un livret comment vivre le deuil et vénérer nos morts, l’avoir à porter de main nous aiderons énormément.