Introduction
La « Lectio Divina » est une manière de chercher à entendre la parole que Dieu nous adresse à travers un passage de la Bible, et à y répondre. Elle comprend 3 parties :
- une lecture attentive du texte dans son contexte ;
- une écoute intérieure de la Parole de Dieu, de l’appel qu’il nous fait aujourd’hui à partir de ce texte ;
- un temps de prière (personnelle ou en groupe) pour donner sa réponse à l’appel que nous fait le Seigneur.
- 1. Lire un texte :
1.1. Contexte
Les récits de la « fuite en Egypte » (Mt 2, 13-15) et du « retour à Nazareth » (Mt 2, 19-23) font partie de ce qu’on appelle « l’Evangile de l’Enfance » chez Mathieu. Cette section de l’Evangile de Mathieu (ch 1 et 2) a pour but, non pas de raconter dans le détail ce qui s’est passé, mais plutôt de montrer comment dès l’enfance de Jésus, il y a des signes de sa vocation profonde : i.e., sa vocation de messie du peuple Juif mais en même temps destiné à un rayonnement universel parmi les païens ; messie rejeté par les autorités de Jérusalem mais accueilli dans la foi par les païens.
L’Evangile de l’Enfance chez Mathieu comprend quatre petites sections :
a) la généalogie de Jésus qui montre son enracinement dans le peuple Juif : il est fils de David, et fils d’Abraham.
b) l’annonce faite à Joseph qui explique comment Jésus est Fils de David – par l’adoption par Joseph, descendant de David.
c) l’épisode des Mages qui montre comment la naissance de Jésus n’est pas accueillie par les autorités de Jérusalem mais attire l’émerveillement des mages et des païens.
d) la fuite en Egypte et le retour à Nazareth qui montrent comment Jésus assume le destin de son peuple et refait pour ainsi dire son itinéraire: comme ses pères qui avaient dû fuir en Egypte avec Jacob et ses fils, Jésus a dû fuir en Egypte avec sa famille ; comme ses pères qui sont retournés d’Egypte avec Moïse, Jésus retourne lui aussi en terre d’Israël, avec sa famille. Il connaît comme son peuple l’angoisse du départ, la souffrance de l’exil et la joie du retour dans la Terre Promise. Mais à son retour, Jésus n’est pas accueilli par des autorités juives à Jérusalem ; il doit aller résider en Galilée où il aura un grand impact dans ce « carrefour des Nations païennes ».
1.2. Déroulement du texte
Les deux tableaux (celui de la fuite en Egypte, comme celui du retour à Nazareth) sont construits de la même manière :
– d’abord il y a un ordre donné par l’ange du Seigneur ;
– il y a ensuite l’exécution de l’ordre,
– et, enfin, il y a une citation d’un passage de l’Ancien Testament qui révèle le sens de l’épisode.
a) La fuite en Egypte (Mt 2, 13-15)
– Dès sa naissance, la vie de Jésus est menacée par les autorités juives (Mt 2, 13). Plus tard, Jésus reconnaîtra humblement que ce rejet est la chose qui le fera souffrir le plus ; c’est ce rejet qui le conduira à sa mort (cf. Mt 16, 21). Devant ce rejet ici, Joseph reçoit l’ordre de partir. Partir c’est mourir un peu.
– Joseph et sa famille obéissent et partent en exil avec tous les arrachements que cet exil entraîne. Ils partent « dans la nuit », i.e., sans savoir ce qui les attend au bout du voyage. Ils partent en faisant confiance. Ils acceptent d’être en route, de ne pas s’installer quelque part, mais d’être toujours en route, en attente de ce que le Seigneur veut leur donner.
– La citation du prophète Osée « d’Egypte j’ai appelé mon fils » (Mt 13, 15) indique d’abord la tendresse de Dieu pour son peuple qui est comme la tendresse d’un Père pour son enfant. Avec Jésus, nous découvrons que non seulement le peuple Juif, mais chacun de nous est vraiment un « enfant », un fils ou une fille de Dieu. C’est pourquoi Dieu ne laisse pas son peuple pâtir dans les souffrances de l’Exil ; il l’appelle d’Egypte, et lui fait faire un chemin d’exode, un passage comme celui que le Christ fera de la souffrance et de la mort à la résurrection et la vie.
b) Le retour à Nazareth (Mt 2, 19-23)
– Hérode, celui qui voulait faire périr Jésus, est mort. L’Ange du Seigneur en avertit Joseph et lui ordonne de revenir au pays d’Israël, de « sortir » d’Egypte, symbole d’exil et de souffrances injustes (Mt 2, 19-21).
– Mais ce chemin d’Exode n’est pas tout droit, tout direct. En chemin, il rencontre des obstacles (comme Moïse autrefois en avait rencontré quand il faisait sortir son peuple d’Egypte). C’est encore le risque de rejet et de persécution par les autorités dont l’Ange avertit Joseph. Ce qui suggère que tous les problèmes ne sont pas résolus par le simple fait d’arriver en Terre Promise. Il y a encore des menaces de mort. C’est pourquoi Joseph et sa famille ont encore du chemin à faire et doivent pousser jusqu’en Galilée et s’installent à Nazareth.
– La citation « Il sera appelé Nazoréen » n’existe pas comme telle dans l’Ancien Testament. Elle est plutôt comme un jeu de mot que fait Mathieu entre « Nazaréen » habitant du village Nazareth où Jésus et sa famille s’installent et « Nazoréen » mot que la Bible emploie en plusieurs lieux pour désigner quelqu’un qui est « consacré à Dieu » (cf. Iz 13, 5-7 ou Amos 2, 11-12). En arrivant en Galilée, carrefour des païens, Jésus ne dévie pas de sa mission mais au contraire, le fait d’être consacré à Dieu et à sa mission le conduit vers les païens. Il doit annoncer le Royaume de Dieu aux Juifs mais aussi aux Païens. C’est ce que Jésus, devenu adulte, cherchera à montrer dans la synagogue de Nazareth (cf. Lc 4). C’est aussi ce que Mathieu soulignera quand il présentera Jésus adulte, entrant en Galilée après on baptême : il montrera comment en ce faisant, il accomplit les prophéties (Mt 4, 12-16).
- 2. Ecouter une Parole que Dieu nous adresse à travers ce texte
Les récits de l’exil de la Sainte Famille en Egypte et de son retour à Nazareth sont pleins d’enseignement pour nous aujourd’hui.
a) Dès ses premiers pas dans la vie humaine sur la terre, Jésus rencontre l’opposition, est menacé de mort. Ses parents, obéissant aux paroles de l’Ange, doivent se lever, partir en pleine nuit et faire un long voyage sans trop savoir ce qui les attend en Egypte, leur terre d’exil. Mais déjà cette fuite en Egypte, est accompagnée comme par une promesse – la promesse que Dieu rappellera son fils d’Egypte.
Dans nos vies aussi, il arrive que des obstacles se dressent devant nous et menacent notre vie, notre vie physique ou notre vie chrétienne. Nous ne devons pas nous étonner de rencontrer de telles épreuves. Jésus lui-même les a connues dès les premiers jours de sa vie. Nous sommes invités alors à être attentifs à la parole de Dieu qui nous appelle à nous lever, à renoncer à ce qui pourrait nous conduire à la mort ou au péché et à nous mettre en route, pour « entendre » ce que Dieu veut nous dire à travers l’épreuve et pour « attendre » ce qu’il nous promet. Ce chemin, nous devons le faire « dans la nuit », i.e. dans la confiance.
Cet appel à partir est fréquent dans la bible. Il invite à des renoncements, mais il est toujours associé à une promesse, la promesse de la paix du retour où apparaît la tendresse de Dieu pour son Fils. « D’Egypte j’ai appelé mon Fils ».
b) Pour Jésus enfant et sa famille, au moment où ils croyaient connaître la paix du retour sur la terre promise, voilà qu’ils rencontrent encore une fois menaces et obstacles et qu’ils doivent repartir plus loin. Comme si le chemin de nos vies est rythmé par une succession de départs dans la nuit et de retours dans la joie. Nous ne pouvons jamais nous installer et dire que nous sommes « arrivés » ; notre appel profond est d’être toujours en route comme des pèlerins jusqu’à que nous arrivions à la maison du Père.
c) Pour Jésus et sa famille, ce nouveau départ inattendu au moment où ils se croyaient arrivés en sécurité, est comme l’occasion de rencontrer d’autres Nations que la Nation Juive – les « Nations » païennes de Galilée. Cela est comme un appel à s’ouvrir à la mission, à vivre plus profondément l’obéissance à Dieu et à la mission qu’il leur confie. Il y a ainsi des détours dans nos vies qui peuvent être providentiels. Si nous acceptons humblement de nous laisser déranger, de faire le détour qui nous est proposé, alors il arrive que nous découvrions notre vocation profonde, un aspect inattendu de la mission que Dieu veut nous confier.
- 3. Prier pour répondre à Dieu qui nous parle
En cette fin d’année, nous pouvons nous interroger sur les « nouveaux départs » auxquels Dieu nous appelle chacun à sa façon aujourd’hui. Cet appel à partir ou à se laisser déranger résonne souvent dans une situation éprouvante (comme pour Jésus et sa famille). Demandons à Dieu la grâce de ne pas résister à l’épreuve, de ne pas nous rebeller contre les contrariétés de la vie, mais plutôt de savoir écouter comme Joseph l’appel à partir.
Demandons lui aussi de ne pas avoir peur de partir, mais de nous apprendre à lui faire confiance, car il nous accompagne sur la route. Et il nous promet de nous mener à bon port.
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