La « Lectio Divina » est une manière de chercher à entendre la parole que Dieu nous adresse à travers un passage de la Bible, et à y répondre. Elle comprend 3 parties :
- une lecture attentive du texte dans son contexte ;
- une écoute intérieure de la Parole de Dieu, de l’appel qu’il nous fait aujourd’hui à partir de ce texte ;
- un temps de prière (personnelle ou en groupe) pour donner sa réponse à l’appel que nous fait le Seigneur.
1ère partie – Lecture d’un texte
1.1. Contexte
Le texte que nous lisons aujourd’hui fait partie du récit de la Passion selon St luc.
Après sa condamnation par Pilate (Lc 23, 24-25) et après avoir fait un bout de chemin en portant sa croix (Lc 23, 26-32) Jésus vient d’arriver au « lieu appelé CRANE » (ou « Calvaire ») où il sera crucifié avec deux malfaiteurs, l’un à droite et l’autre à gauche (Lc 23, 33).
Notre texte va raconter ce qui se passe entre le moment où Jésus a été suspendu à la croix, et le moment où il meurt sur la croix. Chacun de ces moments est marqué par une prière de Jésus. Au moment où il est suspendu à la croix, il dit « Père, pardonne leur, ils ne savent pas ce qu’ils font » (Lc 23, 34) et au moment où il meurt, il dit « Père, entre tes mains je remets mon esprit » (Lc 23, 46).
Ces deux prières de Jésus en croix encadrent notre récit. Elles manifestent l’esprit dans lequel Jésus vit son crucifiement : une attitude de confiance et d’abandon envers son Père et une attitude de pardon et de bienveillance envers ceux qui le crucifient et ceux qui regardent.
1.2. Déroulement du texte
a) v. 35-36 Parmi les gens qui regardent Jésus en croix, il y a un contraste fort entre d’un côté le peuple qui se tient dans un silence troublé, ému, quasi respectueux, et de l’autre, les chefs et les soldats qui se moquent et ricannent.
b) v. 37-39 Les moqueries des chefs, des soldats et même d’un des larrons portent sur un seul point : si tu es le « Christ de Dieu » (i.e. l’envoyé de Dieu) comme tu le prétends, si tu es « le roi des Juifs » comme tu le prétends et comme c’est écrit sur l’inscription, pourquoi tu ne te sers pas de ton pouvoir pour te sauver par toi-même ? Pour eux le fait que Jésus ne descend pas de la croix est comme une preuve que Jésus n’est ni le Christ de Dieu ni le Roi des Juifs ; parce que, selon eux, si Jésus était vraiment envoyé de Dieu et roi des Juifs, il se serait arrangé pour être délivré de ce supplice. Jésus ne réagit pas à ces moqueries. Il reste silencieux dans sa souffrance physique autant que morale.
c) v. 40-43 C’est l’autre larron qui réagit aux railleries de son camarade. Sa manière de se situer par rapport à Jésus est très différente de celles des autres. Lui il reconnaît qu’il a été coupable d’un crime et qu’il mérite la peine qui lui a été infligée. Et c’est à partir de cette reconnaissance de sa faute qu’il implore la miséricorde de Jésus « souviens toi de moi quand tu viendras comme Roi ». La réponse de Jésus est positive et immédiate comme elle l’a toujours été devant un pécheur qui reconnaît son péché et s’en remet à la miséricorde de Dieu.
- 2. Ecouter la Parole de Dieu qui nous est adressée dans ce texte
2.1. Il y a dans ce récit des contrastes forts entre les différentes manières de se situer par rapport au Christ en croix
– d’abord il y a une grande différence entre la façon dont le peuple regarde en silence et la façon dont les chefs et les soldats se moquent.
– Ensuite il y a le contraste saisissant entre les deux larrons.
Il semble que le récit nous invite à choisir notre manière de nous situer devant le Christ en croix. Nous sommes tous quelque part au pied de la croix ; nous savons tous ce qui s’est passé ; nous ne pouvons pas rester indifférents. Il nous faut choisir notre manière de nous situer par rapport à Jésus qui meurt sur la croix.
a) notre regard sur le Christ en croix sera-t-il superficiel, détaché et ironique comme celui des chefs et des soldats ? Il semble que pour eux la crucifixion de Jésus est comme un « fait divers » qui ne les touche pas. Ils se blindent derrière un humour ironique, qui comme un écran, les empêche de voir les vraies dimensions du mystère d’amour qui se déroule sous leur yeux.
b) Ou bien notre regard sera-t-il comme celui du peuple qui se sent touché ; même s’il ne comprend pas ce qui se passe, au moins il reste dans un silence respectueux et attentif. Ce respect, ce silence vont l’aider à cheminer. Le texte dit que le peuple retourne chez lui « en se frappant la poitrine » (Lc 23, 48).
c) Notre regard sera-t-il sec et agressif comme celui du premier larron. Lui, il est centré sur lui même ; il ne cherche qu’un moyen pour sortir de cette mauvaise passe et retrouver son confort matériel. Pour lui, Jésus n’est qu’un des moyens possibles. Jésus n’est interessant pour lui que dans la mesure où il pourra servir ses intérêts. Le larron ne se remet pas en question ; il blâme le Christ de ne pouvoir rien faire pour lui, i.e., de ne pas lui donner ce que lui veut.
d) Ou bien serons-nous disposés comme le deuxième larron à nous remettre en question et à reconnaître notre péché simplement, humblement. Lui, le deuxième larron se remet à la miséricorde du Christ qui se manifeste sur la croix ; il se laisse conduire par lui, sur les chemins de la vie, jusqu’au Paradis.
2.2. Il y a aussi dans ce récit plusieurs allusions à la royauté du Christ
– « Si tu es le Roi des Juifs, disent les soldats, sauve-toi toi même » (Lc 23, 37).
– L’inscription sur la croix de Jésus disait « Celui-ci est le Roi des Juifs » (Lc 23, 38).
– « Souviens toi de moi quand tu reviendras comme Roi » dit le deuxième larron à Jésus (Lc 23, 42).
Les différentes personnes qui assistent à la crucifixion de Jésus n’ont pas la même idée sur ce qu’est la royauté de Jésus. Là aussi le récit nous pousse à réfléchir et à choisir.
a) Pour les soldats, la Royauté de Jésus signifie que, à la manière des rois de la terre, Jésus a un grand pouvoir. Si Jésus était vraiment Roi, il aurait pu, selon eux échapper aux bourreaux, descendre de la croix et se sauver. Pour eux, être Roi c’est avoir le pouvoir d’échapper aux problèmes, aux difficultés qui affectent normalement les hommes ordinaires. Si Jésus ne réussit pas cela, c’est pour eux une preuve que Jésus n’est pas vraiment Roi.
b) Pour le deuxième larron, la Royauté de Jésus est tout autre chose : ce n’est pas un pouvoir politique ou militaire. C’est plutôt le pouvoir de l’amour, l’immense capacité que Jésus a de pardonner, d’aimer gratuitement et fidèlement jusqu’au bout. La royauté de l’amour, la grande puissance d’aimer de Jésus se manifeste souvent au sein même de sa grande vulnérabilité, de sa grande faiblesse devant les pouvoirs politique et militaire de ce monde.
Jésus, lui, a choisi clairement sa façon d’être Roi ; il est Roi dans la mesure où il témoigne de l’amour gratuit et fidèle de Dieu. Il a payé un prix pour nous manifester jusqu’où va sa Royauté d’amour.
Nous aussi sommes invités à nous situer par rapport à la Royauté de Jésus : est-ce que nous allons nous adresser à lui comme s’il était un Roi de puissance matérielle, comme l’ont fait les soldats ou comme le premier larron ? Si nous le faisons nous serons toujours déçus et aigris et deviendrons agressifs comme le premier larron. Ou bien allons nous plutôt accueillir profondément la façon originale que Jésus a eu d’être Roi, une royauté d’amour ? Alors nous pourrons nous approcher de lui humblement comme le deuxième larron, en admettant nos fautes et en faisant appel à sa miséricorde. Si nous le faisons, nous serons comblés au delà de nos espérances comme le deuxième larron.
- 3. Prier pour répondre à Dieu qui me parle
a) Demander à Dieu notre Père la grâce de nous conduire à la contemplation tranquille du Christ en croix.
Demander à l’Esprit de nous « conduire vers la vérité toute entière », i.e., à nous conduire à accueillir le mystère d’amour qui se manifeste en Jésus sur la croix.
Rendre grâce à Jésus d’avoir bien voulu endurer le supplice de la croix pour nous manifester ce mystère d’amour.
b) Demander à Jésus la grâce de me laisser sauver par lui comme le deuxième larron s’est laissé sauver. Demander la grâce de reconnaître mon péché, ma faiblesse, ma pauvreté devant Lui ; la grâce de me confier à lui dans ma faiblesse en faisant confiance à sa miséricorde.
c) Lorsque je passe moi aussi par l’épreuve, demander à Jésus de me conduire, à partager les deux attitudes fondamentales qui l’habitent sur la croix
– sa capacité de pardonner à ceux qui lui font du mal « Père pardonne leur.. »
– sa capacité de s’abandonner à son Père dans la confiance « Père entre tes mains… ».
d) i) Demander à Jésus de ne pas chercher en lui une Royauté de prestige et de puissance matérielle mais de m’attacher plutôt à sa Royauté d’amour et à la façon dont cette Royauté se manifeste dans sa capacité de pardonner, d’être attentif aux plus petits, d’aimer gratuitement, fidèlement et avec patience.
(ii) Demander aussi à Jésus de savoir reconnaître les reflets de sa Royauté d’amour en particulier chez ceux et celles qui, au cœur souvent de grandes souffrances morales ou corporelles, persévèrent dans la confiance et dans l’amour, pardonnent à ceux qui leur font du mal et manifestent ainsi sa capacité « royale » d’aimer au cœur d’une apparente détresse.
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