Cette semaine, tous les regards sont tournés vers le Brésil. La raison : les Journées mondiales de la jeunesse (JMJ). Du 23 au 28 juillet, le Christ et Rio accueillent donc des milliers de jeunes, et… un invité de marque, le pape François. Une délégation mauricienne y participe également. Les rues de Rio sont actuellement investies d’une marée humaine constituée essentiellement de jeunes venus des quatre coins du monde pour participer aux Journées mondiales de la jeunesse (JMJ). Un million et demi de participants environ, dont une quarantaine de Mauriciens. Cette délégation mauricienne a quitté Maurice le 9 juillet dernier pour le Brésil, en passant par l’Afrique du Sud. Un déplacement minutieusement préparé, notamment à travers les sessions de travail et de formation spirituelle qui se sont étalées sur plusieurs mois. Et si, comme bon nombre de délégations, celle de Maurice est arrivée plusieurs jours avant les JMJ, un programme bien étoffé avait aussi été concocté. Il s’agissait pour la délégation mauricienne de participer au camp Magis. Tout comme cela avait été le cas pour la JMJ 2011 à Madrid.
Un pape souriant
Magis est un concept élaboré par des membres de la Compagnie de Jésus (les Jésuites). Lors des JMJ, Magis permet aux jeunes de se retrouver en petits groupes de diverses nationalités pour vivre des expériences à la fois humaines et spirituelles. Temps de rencontre, de découverte, de ressourcement, d’enrichissement à travers des « expériments » qui peuvent être de nature artistique, écologique, spirituelle, etc. Et une fois encore, la délégation mauricienne s’est enrichie de cette opportunité qui lui a été donnée (voir témoignages plus bas).
C’est le lundi 22 juillet que le pape François est arrivé à Rio. Très attendu par les jeunes, il a été accueilli par une marée humaine. Et s’il a été rejoint à sa descente d’avion par la présidente du Brésil, Dilma Rousseff, la presse internationale ne manque pas de noter la très grande simplicité qui a marqué son arrivée. « Généralement, quand un pape arrive à l’aéroport,
il y a une cérémonie d’accueil, de la musique militaire, l’hymne du pays qui accueille, l’hymne du Vatican qui est joué. Ce 22 juillet, rien de tout cela. À la place, une chorale d’enfants et un bouquet de fleurs. Une arrivée très peu protocolaire donc », commente Geneviève Delrue, envoyée spéciale de RFI à Rio.
Et malgré la menace de protestation contre les politiques économiques du gouvernement brésilien, et qui risqueraient de perturber ces JMJ, c’est un pape serein et souriant qui est arrivé à Rio et qui a s’est bien vite mis à l’ouvrage. Participer à ces JMJ est pour le pape François d’une importance capitale et lors de son premier discours, il n’a pas manqué de dire son affection tant pour les jeunes que pour le peuple brésilien.
« J’ai appris que pour avoir accès au peuple brésilien, il fallait entrer par la porte de son cœur immense : qu’il me soit donc permis aujourd’hui de frapper délicatement à cette porte. Je demande la permission d’entrer et de passer cette semaine avec vous, Je n’ai ni or, ni argent, mais je vous apporte ce qui m’a été donné de plus précieux : Jésus Christ ! », devait-il déclarer lors de la cérémonie de bienvenue dans le Jardin du Palais Guanabara (Rio). « Il n’est pas rare chez vous d’entendre les parents dire : ‘Les enfants sont la pupille de nos yeux.’ Comme elle est belle cette expression de la sagesse brésilienne qui applique aux jeunes l’image de la pupille des yeux, la fenêtre à travers laquelle la lumière entre en nous et nous offre le miracle de la vision ! Qu’en sera-t-il de nous si nous ne prenons pas soin de nos yeux ? Comment pourrons-nous avancer ? Mon souhait est que durant cette semaine, chacun de nous se laisse interpeller par cette question provocatrice. »
Cherchant toujours à être proche des plus pauvres, le pape François marque indéniablement ces JMJ par deux étapes effectuées durant son séjour. Jeudi il a visité la communauté de Varginha, une favela de Rio. Alors que vendredi il rencontre quelques jeunes détenus au Palais épiscopal St-Joaquim.
L’engouement des jeunes pour le JMJ interpelle plus d’un. En effet, depuis vingt-six ans, les JMJ mobilisent des milliers, voir des millions de jeunes à travers le monde. Des jeunes fiers, heureux d’affirmer leur foi en Jésus-Christ. Une attitude qui prend à contrepied l’impression de phénomène de déchristianisation, d’abandon de la foi chez les jeunes.
Pour le cardinal Stanislaw Rylko, président du Conseil pontifical pour les laïcs, l’organe du Vatican qui coordonne l’ensemble des JMJ : « Dans un monde de confusion, où tant de certitudes s’écroulent, beaucoup de jeunes découvrent chez le Christ un Ami en qui ils peuvent avoir confiance, un Guide sûr, le Rocher sur lequel bâtir son existence. Ils découvrent ensuite dans l’Église – souvent présentée par les médias comme une institution froide et éloignée de l’homme − une compagnie d’amis… une vraie famille aux dimensions planétaires ! » (Radio Vatican)
Aspect missionnaire
Pour cette édition 2013, ces JMJ revêtent d’un aspect particulièrement missionnaire. Ainsi à travers le thème choisi : « Allez donc ! De toutes les nations faites des disciples » (cf. Mt 28, 19), le pape invite les jeunes à aller dire leur foi et leur joie au monde. « Les jeunes doivent dire au monde : il est bon de suivre Jésus ; il est bon de sortir de soi-même pour aller jusqu’aux périphéries du monde et de l’existence pour porter Jésus… », confiait-il d’ailleurs lors de son homélie le 24 mars dernier, Dimanche des Rameaux.
Qu’est-ce qu’il y a après les JMJ ? Les JMJ ne sont en effet pas la fin d’un cheminement mais bien comme un envoi en mission. Le début d’une belle aventure. Pour le cardinal Stanislaw Rylko, « les JMJ sont une semence de l’Évangélique qui doit produire du fruit, elles demandent une préparation et un suivi. Nombreux sont alors les fruits spirituels, parfois radicaux : conversions, changements de vie, appels au sacerdoce ou à la vie consacrée, au mariage chrétien ; découverte du sacrement de la réconciliation, et de la prière en général… Les JMJ ont fait naître une nouvelle génération de jeunes – des jeunes qui ont dit ‘oui’ au Christ et à son Église – mais aussi une nouvelle génération d’agents pastoraux, plus sensibles aux
besoins spirituels des jeunes… »
Dossier réalisé par Martine Théodore-Lajoie (La Vie Catholique)
Délégation mauricienne aux JMJ
De Soweto… au Brésil
Nous, les quarante membres de la délégation mauricienne, avons pris l’avion mardi 9 juillet pour les JMJ de Rio 2013. Nous avons eu l’opportunité de transiter par l’Afrique du Sud et
y avons eu une riche journée, le lendemain, que nous appellerons le Madiba Day. Cette journée a permis au groupe de mieux prendre connaissance de la souffrance et du combat du peuple noir d’Afrique du Sud à l’époque de l’apartheid. Ce, à travers les visites faites à la Constitutional Court, au musée de l’apartheid, à la maison de Nelson Mandela (Madiba) et au mémorial du jeune Hector Pieterson à Soweto, ville emblématique et historique du combat d’un peuple assoiffé de liberté et d’égalité.
Nous y avons aussi découvert en profondeur la vie et les idéaux de ce grand homme appelé Madiba, de son nom de clan. Le père Steves Babooram nous a invités dès le matin à mettre davantage nos sens en action pour mieux habiter et ressentir les espaces visités car ils témoignent d’un vécu qu’on ne pourra jamais oublier. De plus, ce passage à Soweto nous
a permis de célébrer l’Eucharistie dans la paroisse jésuite St-Martin de Porres, et la messe s’est terminée par le chant engagé Zanfan Soweto.
Ensuite, nous avons poursuivi notre voyage le 11 courant vers le Brésil en passant par São Paulo. Un autre avion nous a menés à Salvador de Bahia pour le lancement du programme MAGIS. Ce dernier regroupe 53 pays des cinq continents, avec la participation de quelques 2000 jeunes. Trois jours de découvertes, de surprises, de rencontres, de célébrations et de fêtes par la danse, le spectacle et des temps de prière. Le père Adolfo Nicolas, Supérieur général des Jésuites, a présidé la messe du dimanche en vue d’envoyer les pèlerins à leurs différents sites d’expériments. Nous y reviendrons dans un prochain article.
Nous pouvons déjà dire que nous sommes fiers d’être ici pour représenter notre pays et notre Église. C’est aussi pour vivre le MAGIS, pour vivre le DAVANTAGE en nous exposant à des réalités différentes des nôtres à Maurice et dans notre vie de jeunes chrétiens. Tout cela en vue de nous préparer à vivre les JMJ dans une semaine à Rio.
À bientôt pour d’autres nouvelles et une invitation à visiter le site de MAGIS 2013 (http://magisbrasil.tumblr.com/) et la page Facebook (http://www.facebook.com/MagisBrasil), sans oublier les hastags « #magis2013 » et « #magisbrasil » sur twitter pour rester en contact avec toute la délégation et suivre notre parcours.
Aurore Mongelard et Yannick Casquette
De Salvador de Bahia
Temps d’ « expériments »,
déplacement pour un « davantage »
Notre délégation était divisée en 6 équipes pour vivre différents expériments selon nos choix, notamment de type d’action sociale, de pèlerinage, d’immersion socioculturelle et d’écologie à travers le Brésil. Quelques témoignages de pèlerins de la délégation mauricienne…
Lindon Lacour : « Durant notre expériment de pèlerinage, nous avons parcouru plusieurs villages typiques du Brésil dans la région de Lapin Grosso de Bahia. En les parcourant, quel que soit le lieu, on arrivait dans l’après-midi pour y passer la nuit, on était unanime à dire que ce sont des gens très chaleureux, authentiques et généreux, ayant peu de moyens matériels. Nous avons mangé comme eux, par exemple, du riz et du maïs, des grains secs, de la viande froide, des légumes et beaucoup de fruits. Notre groupe composé d’Argentins, d’Uruguayens et de Mauriciens a été très touché par leur sens d’accueil et de partage. Même si la langue était une barrière, l’amour n’avait pas de langage, ça m’a permis de faire une réflexion
profonde avec le Christ et aussi de voir que Dieu est présent et travaille le cœur des hommes. »
Kate Salomon : « In all things to love and to serve. Ces quelques mots m’ont habitée pendant tout mon expériment. J’ai appris à trouver Dieu en toute chose, dans le sourire de ces enfants que je servais, dans le visage de ces personnes rencontrées qui m’ont témoigné de l’amour du Christ. J’ai appris à aimer et servir Dieu à travers les autres. Je ressors de cette expérience enrichie et remplie de joie; la joie d’aimer et d’être aimée de Dieu et des autres. »
Jean-Marie Levaillant : « Ah ! Qu’il est difficile de ne pas tout maîtriser ! Ah ! Qu’il est difficile de se laisser guider ! En tant qu’animateur de groupe, cadre au travail ou membre de plusieurs groupes ou instances de décision, je suis habitué à tout planifier, tout régler, tout coordonner et quand vient le moment d’être “participant”, je commence à juger, trouver des failles, penser qu’on pourrait s’y prendre autrement, être impatient, m’énerver, pour finir par ne pas vivre le moment ‘M’. Magis m’a permis de briser tout ça. Magis m’a rendu disponible aux autres et à Dieu. Magis a brisé les barrières de langues entre moi et les autres jeunes de mon lieu d’expériment. Magis m’a montré que je n’ai pas tous les pouvoirs, que je ne peux tout contrôler, tout maîtriser. Magis a fait une brèche, a percé et a détruit mon bouclier de protection. Dieu m’a donné un autre regard, ‘le troisième œil’, tel que nous l’a décrit le père Adolfo Nicolàs, celui qui permet de voir le cœur des gens. Les apparences, les couleurs, les ‘races’, les peuples et les cultures me sont secondaires ; les seules choses qui comptent sont la bonté,
la chaleur humaine, l’affection et l’amour qu’on peut porter aux autres. Notre cœur produit de l’Amour indéfiniment. C’est à nous d’arroser d’espérance la terre aride ces jours-ci.
Lors de mon expériment, j’ai découvert que j’étais talentueux, créatif, que je peux écouter, entendre, faire silence, discerner et être accueillant, capable d’accueillir l’amour, de trouver l’espérance et de trouver Dieu. Mervyn, un participant mauricien, nous disait que les pauvres donnent plus car ils donnent tout. Moi, Dieu m’a privilégié en me donnant des mains, des pieds, un cerveau, une famille, un travail, de l’affection et de l’amour. Je dois donner plus, aller plus loin dans le sens du ‘davantage’ de Magis. Au-delà de mes capacités,
au-delà de mes compétences, aller au Mag num ».
L’Église au Brésil
Entre déclin et dynamisme
La nouvelle en a surpris plus d’un. Au Brésil – pays qui compte le plus de catholiques au monde − le nombre de catholiques semble être en baisse.
C’est ce qu’ont révélé les résultats du dernier recensement de la population (réalisé en 2010) par l’Institut brésilien de géographie et des statistiques (IBGE), ainsi que ceux d’une étude effectuée par la prestigieuse fondation Getúlio Vargas (FGV). Ainsi donc, selon ces recherches, « le taux de catholiques dans la population était passé de 73,8 % en 2003
à 68,4 % en 2009, ce qui signifie une baisse de 5,4 % ». Contrairement au nombre de chrétiens évangéliques, passé de 17,9 % en 2003 à 20,2 %. D’autres personnes, notamment des ecclésiastes, semblent porter un autre regard sur la situation de l’Église au Brésil. Par exemple, le nombre des mouvements liés à l’Église catholique du Brésil, et en particulier au
Renouveau charismatique catholique, ont augmenté. Ils se sont même étendus à d’autres pays.
Vitalité des catholiques
C’est au Brésil par exemple que sont nées deux des communautés charismatiques affichant la plus forte croissance dans l’Église : la communauté Canción Nueva (« Nouveau chant ») et la communauté Shalom. Des communautés, approuvées par le pape, et qui s’adressent avec beaucoup de succès à la jeunesse, favorisent les groupes de prière, encouragent un engagement
accru de la part des catholiques ainsi que les vocations à la prêtrise et à la consécration religieuse. Des communautés vivantes et dynamiques qui ne lésinent pas sur les moyens pour être proches des fidèles, dont les médias.
Rodrigo Luiz, missionnaire de la communauté Canción Nueva et en fonction dans le département de communication de la chaîne de télévision gérée par sa communauté, a d’ailleurs fait ressortir lors d’une interview qu’il avait accordée au journal catholique d’Amérique du Nord, Our Sunday Visitor, que les derniers chiffres et les statistiques les plus récentes sur l’Église n’avaient pas pris en compte la vitalité des catholiques brésiliens, et surtout celle de la jeune génération.
La communauté Canción Nueva, par exemple, compte plus de 1 200 missionnaires dont la plupart sont âgés de moins de 30 ans. Elle organise des excursions et des journées de retraite spirituelle auxquelles participent chaque année des centaines de milliers d’adolescents dans tout le Brésil. La communauté Shalom, pour sa part, totalise plus de 4 000 missionnaires au Brésil – dont certains ont fait vœu de célibat −, qui vivent dans de petites communautés consacrées à la ré-évangélisation. Au cours du seul Festival Halleluya qui s’était déroulé en 2012 à Fortaleza (État fédéral de Ceará), la communauté Shalom a réuni plus d’un million de personnes, majoritairement de moins de 25 ans.
Endiguer l’hémorragie
Certes, il est aussi vrai, que « beaucoup de jeunes gens sont déçus de l’Église », avance pour sa part le père Márcio Queiroz, directeur du département de communication du Comité local d’organisation des JMJ de Rio en 2013 dans un entretien avec l’hebdomadaire catholique Sunday Visitor. Mais, « le nombre de jeunes qui commencent maintenant à vivre la foi catholique s’accroît vraiment ».
« Notre plus grand espoir, poursuit le père Queiroz, est que la visite du pape incite beaucoup de ‘catholiques statistiques’ à redevenir des catholiques de cœur à travers leur engagement dans les nouveaux mouvements, communautés et paroisses. »
Face aux résultats avancés par l’IBGE et la FGV, l’Église catholique au Brésil a choisi de réagir. Ainsi, lors de la dernière Conférence nationale des évêques du Brésil (CNBB) à Brasilia, le Conseil épiscopal pastoral a souhaité réfléchir aux moyens d’endiguer l’hémorragie des fidèles. « Il faut prendre au sérieux ces résultats », a assuré le cardinal Claudio Hummes, archevêque émérite de Sao Paulo. Car « depuis que des statistiques ont commencé à être publiées sur les catholiques au Brésil, la chute du nombre de fidèles n´a jamais cessé. Il faut donc partir de la foi du peuple et ne pas mettre en doute la foi que les personnes manifestent, même si elle ne répond pas à une base théologique élaborée ».
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