Il y a 20 ans, à Grand-Gaube, faisant fi du politically correct, le père Cerveaux lançait le terme « malaise créole » lors d’un un état des lieux de la communauté créole à Maurice. Ce dimanche 28 octobre, Grand-Gaube a de nouveau rendez-vous avec l’Histoire pour un nouveau constat et, peut-être, un nouveau départ.
Il faut le reconnaître : en deux décennies, cette communauté a beaucoup progressé. Elle a retrouvé confiance en elle, en ses capacités, et veut se faire une place au soleil mauricien. Son traitement dans l’affaire Naëck le prouve amplement.
Aujourd’hui, pour de nombreuses familles, l’éducation est une valeur phare. À l’image de cette mère qui touche Rs 3 200, dont les deux plus grands enfants ont fait des études universitaires, alors que le petit dernier, en HSC, est aujourd’hui bien motivé à suivre les traces de ses aînés… À l’image encore de ce père de famille, employé d’usine, qui sans se plaindre, cumule overtime sur overtime... Lentement mais sûrement, sans faire la « une » des titres, des parents créoles consentent à de très gros sacrifices pour assurer l’ascenseur social de la next generation.
Ce progrès, nous le devons aussi à ces nombreuses organisations créoles qui ont su abattre un travail de sensibilisation, avec la spécificité de leur charisme, de leur mode de fonctionnement différencié et parfois de leur inévitable conflit. À l’Église qui a su entendre le SOS, faire son autocritique et agir en conséquence : promotion de l’inculturation, ouverture de ses établissements d’élite aux low achievers, option préférentielle pour les plus pauvres…
Aussi à l’État qui a permis que la cause créole, commencée en 1993 par un malaise indentitaire, devienne une cause de toute la nation maurienne. Pour preuve : un Diksyoner kreol, l’entrée du kreol au primaire, les recommandations de la Truth & Justice Commission, la mise en place d’une Equal Opportunity Commission…
20 ans plus tard, certes, tous les problèmes affectant la communauté créole ne sont pas dissipés comme neige fondant au soleil. Certaines familles sont toujours sans gouvernail. Les 35% d’échecs en Std VI frappent de plein fouet les enfants créoles. Les discriminations perdurent, les stéréotypes et les stigmatisations font plafonner…
Le Comité diocésain 1er Février et les Forces vives de Grand-Gaube qui invitent ce dimanche à « goûter à la culture créole », travaillent à la concrétisation d’une Konvansyon kreol pour 2013. Des nombreux leaders de la communauté, invités ce 28 octobre, 23 ont déjà répondu positivement. On brassera certainement large ce dimanche à Grand-Gaube. Avec comme motivation : faire encore un pas, des pas, en avant. Et avec comme base le travail le volumineux rapport de la Truth & Justice Commission qu’il ne faut surtout pas laisser dormir dans les tiroirs. Des exemples positifs de persévérance existent dans la communauté, des role models, ou devrions-nous plutôt dire, des Creole models qui devraient encourager les autres à lutter pour s’affirmer…
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