Interview parue dans Business Mag (25 février 2008)
- Comment avez vous vécu le jour de l’indépendance ?
J’étais étudiant en théologie à Dublin en mars 1968 lorsque le pays a accédé à l’indépendance. J’étais parti pour mes études dès juin 1961 et à cette époque, avec les communications bien moins développées qu’aujourd’hui, je ne pouvais suivre que de loin les événements à Maurice et les diverses étapes de la conférence constitutionnelle qui avait lieu à Londres. Cependant, je me souviens très bien que des Mauriciens établis à Londres, qui suivaient la conférence m’assuraient que l’indépendance était inéluctable et qu’il fallait s’y préparer. Pour ma part, j’attendais cette accession du pays à l’indépendance avec beaucoup de sérénité et même de fierté.
- D’après vous, quels sont les grands moments de l’indépendance ?
Comme je vous le disais, je n’étais pas au pays à cette époque et par conséquent, je n’ai pas eu la chance de vivre les moments forts de cette période à Maurice. Toutefois, je retiendrai que le Cardinal Jean Margéot, alors vicaire général et administrateur du diocèse de Port-Louis, avait célébré un Te Deum – une célébration pour rendre grâce – à la Cathédrale de Port-Louis à l’occasion de l’indépendance du pays. Il voulait ainsi montrer que l’Eglise s’engageait à participer à la construction de l’Ile Maurice Indépendante. Cela, malgré le fait que la majorité des chrétiens avaient voté contre l’indépendance.
- Quel est votre appréciation sur ces 40 années d¹indépendance ?
Je pense qu’après l’indépendance, il y a eu un sursaut de patriotisme qui a fait que et ceux qui étaient pour et ceux qui étaient contre l’indépendance ont travaillé d’arrache pied pour faire que l’Ile Maurice indépendante puisse réussir. C’est grâce au savoir-faire et à l’esprit d’entreprise de beaucoup de Mauriciens, à la sagesse politique du Dr Ramgoolam et plus tard celle de Sir Aneerood Jugnauth que le pays a pu décoller économiquement.
Aujourd’hui, je ne rencontre pas un seul Mauricien qui regrette l’indépendance. Le fait que nous sommes tous fiers montre que l’indépendance a été une réussite. Je suis de ceux qui sont heureux de vivre dans un pays où des personnes issues de différents continents réussissent à travailler ensemble pour la création d’une société prospère et d’un vivre ensemble original.
- Selon vous, où en sommes nous aujourd’hui ?
L’indépendance n’est pas quelque chose d’acquis pour de bon. Nous avons parcouru un très long chemin mais il nous faut devenir de plus en plus indépendants. Aujourd’hui, alors que les différents filets de protection établis à l’époque coloniale tombent, nous devons prendre des mesures de réformes audacieuses et courageuses pour vraiment devenir indépendants.
En somme, l’Ile Maurice est aujourd’hui aux prises avec les tensions du passage à l’âge adulte. Elle est écartelée entre l’attrait du confort provenant des protections traditionnelles et l’invitation au voyage sur l’océan d’un monde globalisé où l’esprit d’entreprise et la solidarité sont seuls à pouvoir faire contrepoids avec les risques inévitables.
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